Responsabilité d’une commune et compétence du juge administratif

Le 10 Juin 2022

Par Patrick Gaulmin

Dans cette affaire les voisins d’une construction ont sollicité la réparation des dommages qu’ils estimaient avoir subis en raison de certains travaux autorisés par un permis de construire délivré par la commune.

Les voisins avaient saisi la juridiction judiciaire afin d’obtenir une indemnisation de la part du constructeur…mais aussi de la commune, en invoquant le trouble de jouissance qui aurait été causé par leurs agissements respectifs.

Leur argumentation était ainsi uniquement fondée sur les règles du Code civil, la légalité du permis de construire n’étant pas contestée.

La Commune a invoqué l’incompétence de la juridiction judiciaire pour statuer sur les demandes dirigées à son encontre en soutenant que seul le juge administratif était habilité à déterminer si sa responsabilité pouvait être engagée ou pas.

La Cour d’appel a rejeté cet argument au motif que les voisins mécontents ne critiquaient pas le permis de construire puisqu’ils fondaient leurs demandes uniquement sur les règles de la responsabilité civile, telles qu’elles figurent dans le code civil.

Ce raisonnement a été censuré par la Cour de cassation (Cass. civile, 3ème, 9 mars 2022, 19-24.594) dans les termes suivants:

« Vu la loi des 16-24 août 1790 et le décret du 16 fructidor an III :

Il résulte de ces textes que, sauf dispositions législatives contraires, la responsabilité qui peut incomber à l’Etat ou aux autres personnes morales de droit public, en raison des dommages imputés à leurs services publics administratifs, est soumise à un régime de droit public et relève, en conséquence, de la compétence de la juridiction administrative.

Pour rejeter l’exception d’incompétence, l’arrêt retient que, si le contentieux de la légalité des permis de construire relève de la compétence de la juridiction administrative, les demandeurs entendent fonder leurs demandes à l’encontre de la commune sur l’article 544 du code civil et sur l’article 1382 du même code (…), et non sur une éventuelle illégalité du permis de construire accordé à la société XL construction.

En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »

La Cour juge par conséquent que « La responsabilité pouvant incomber à la commune étant soumise à un régime de droit public, il y lieu de déclarer la juridiction judiciaire incompétente pour en connaître ».

Cette décision fait une application de la célèbre jurisprudence BLANCO (TC, 8 février 1873), pierre angulaire du droit administratif.

 

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