Illégalité de la circulaire du Ministre de l’Education Nationale sur la « Ligne AZUR »

Le 16 Oct 2014

Par Patrick Gaulmin

Dans une circulaire du 4 janvier 2013, le Ministre de l’éducation nationale PEILLON invitait notamment les recteurs « à relayer avec la plus grande énergie (…) la campagne de communication relative à la ligne azur, ligne d’écoute pour les jeunes en questionnement à l’égard de leur orientation ou leur identité sexuelles ».

Par une décision du 15 octobre 2014, le Conseil d’État annule cette circulaire  4 janvier 2013 pour non-respect de la neutralité du service public de l’éducation nationale

La décision du Conseil d’État précise notamment qu’il convient de respecter, d’une part, les principes de neutralité du service public et de liberté de conscience des élèves et, d’autre part, d’adapter l’information aux élèves à qui elle est destinée, notamment en fonction de leur âge.

Il incombe ainsi au Ministre de l’éducation nationale de s’assurer, avant le lancement d’une telle campagne, que les éléments d’information qui seront diffusés sont bien conformes à ces principes.

Le Conseil d’État juge qu’il résulte des dispositions législatives des articles L. 121-1 et L. 312-17-1 du code de l’éducation que le législateur a confié aux autorités chargées du service public de l’éducation nationale, outre leur mission d’enseignement, le soin d’apporter aux élèves une information relative à la lutte contre les discriminations.

Compte tenu de la vulnérabilité des élèves face à ces violences, cette information peut, en particulier, sensibiliser les élèves aux discriminations fondées sur l’orientation sexuelle et sur l’homophobie,. Le Conseil d’État estime également qu’il est, en principe, possible, pour assurer cette information, d’avoir recours à l’intervention d’associations spécialisées.

Cette information doit cependant être adaptée aux élèves auxquels elle est destinée, notamment en fonction de leur âge. Elle doit également être délivrée dans le respect du principe de neutralité du service public de l’éducation nationale et de la liberté de conscience.  Il incombe au ministre de s’assurer que les éléments d’information diffusés lors de la campagne respectent ces principes.

En l’espèce, le Conseil d’État relève que le site internet de la « Ligne azur », vers lequel la campagne d’information renvoyait présentait l’usage de drogues comme « susceptible de faire tomber les inhibitions » et comme « « purement » associé à des moments festifs » sans mentionner l’illégalité de cette pratique, définissait la pédophilie comme une « attirance sexuelle pour les enfants » sans faire état du caractère pénalement répréhensible des atteintes ou agressions sur mineurs, et renvoyait à une brochure, intitulée « Tomber la culotte », qui incitait à pratiquer l’insémination artificielle selon des modalités interdites par l’article 511-12 du code pénal.

Compte tenu de ces éléments et sans remettre en cause le principe d’une information en milieu scolaire sur les discriminations en raison de l’orientation sexuelle, le Conseil d’État juge que la décision ministérielle de relayer la campagne de la « Ligne azur » porte atteinte au principe de neutralité du service public de l’éducation nationale. Même si le site internet de la « Ligne azur » n’avait pas entendu faire preuve de complaisance à l’égard des comportements décrits, le Conseil d’État précise que le seul fait de ne pas mentionner le caractère illicite de ces pratiques suffisait, en tout état de cause, à porter atteinte à la neutralité du service public de l’éducation nationale et à rendre illégale l’invitation du ministre à relayer la campagne « Ligne azur ».

On ne peut qu’approuver une telle décision du Conseil d’Etat.

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