L’affaire Leonarda et le Juge administratif

Le 28 Jan 2014

Par Patrick Gaulmin

Après celle concernant DIEUDONNE, voici encore une décision du juge administratif qui sera abondamment commentée.

Le 27 janvier 2014, le tribunal administratif de Besançon a rejeté les requêtes des parents de Leonarda, visant l’obtention d’un titre de séjour en France.

La famille Dibrani, hébergée à Mitrovica par le gouvernement kosovar depuis son expulsion de la France le 9 octobre dernier, demandait l’annulation du refus de titre de séjour, portant obligation de quitter le territoire français (OQTF) et fixant le Kosovo comme pays de retour.

Cette décision n’est pas surprenante car le Rapporteur public du tribunal s’était prononcé pour le rejet de cette requête lors de l’audience du 7 janvier dernier.

Selon le Rapporteur public, le préfet du Doubs n’a «commis aucune erreur manifeste d’appréciation sur la situation des requérants» quand il a ordonné leur reconduite à la frontière.

Sur le fond, la décision n’appelle pas de commentaire particulier, car elle semble conforme à la jurisprudence traditionnelle en pareille matière, cette affaire n’ayant d’exceptionnelle que sa sur-médiatisation.

Sur la forme, elle illustre l’une des particularités du contentieux administratif : l’intervention d’un magistrat appelé Rapporteur public, lors des audiences.

La procédure administrative est essentiellement écrite : les parties échangent leurs arguments en adressant au Tribunal des mémoires, accompagnés de pièces justificatives.

A l’audience, intervient un magistrat : le Rapporteur public, autrefois appelé Commissaire du Gouvernement.

Cette appellation de « Commissaire du Gouvernement » était trompeuse puisqu’elle pouvait laisser penser que ce magistrat représentait le Gouvernement.

Or, il n’en est rien : le Rapporteur public est totalement indépendant du Gouvernement et un changement de nom s’imposait.

Comme son nom l’indique désormais, il procède à une instruction du dossier, en examinant les écritures de parties.

Lorsque l’instruction est terminée, l’affaire est appelée à une audience publique devant le Tribunal, la Cour ou le Conseil d’Etat.

Lors de l’audience, le Rapporteur prononce ses conclusions : il examine chacun des moyens soulevés et conclut ainsi soit à l’annulation de l’acte attaquée soit au rejet de la requête.

Les avocats, du demandeur puis du ou des défendeurs, peuvent ensuite plaider, ou s’en rapporter à leurs écritures, notamment lorsque les conclusions du Rapporteur sont conformes à leurs attente.

Au contraire, si l’un des avocats estime que le Rapporteur public a, par exemple, omis de statuer sur une demande, il peut attirer l’attention du Tribunal sur ce point en adressant, après l’audience, une note en délibéré.

Toutefois, les conclusions du Rapporteur public sont la plupart du temps suivies par le juge, qui rend sa décision quelque semaine plus tard.

L’audience devant les juridictions administratives est donc une étape particulièrement importante du procès: elle permet de connaitre, de façon quasi certaine, le sens de la décision à intervenir, de produire avant le jugement d’ultimes écritures par le biais de la note en délibéré et enfin de comprendre la motivation du jugement, au travers des conclusions faites par le Rapporteur public.

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