Étendue du droit de préemption du locataire commercial

Le 22 Fév 2023

Par Patrick Gaulmin

Aux termes de l’article L145-46-1 du code de commerce, lorsque le propriétaire d’un local à usage commercial ou artisanal envisage de vendre celui-ci, il en informe le locataire par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, ou remise en main propre contre récépissé ou émargement. Cette notification doit, à peine de nullité, indiquer le prix et les conditions de la vente envisagée. Elle vaut offre de vente au profit du locataire. Ce dernier dispose d’un délai d’un mois à compter de la réception de cette offre pour se prononcer. En cas d’acceptation, le locataire dispose, à compter de la date d’envoi de sa réponse au bailleur, d’un délai de deux mois pour la réalisation de la vente. Si, dans sa réponse, il notifie son intention de recourir à un prêt, l’acceptation par le locataire de l’offre de vente est subordonnée à l’obtention du prêt et le délai de réalisation de la vente est porté à quatre mois.

Si, à l’expiration de ce délai, la vente n’a pas été réalisée, l’acceptation de l’offre de vente est sans effet.

(…) Le présent article n’est pas applicable en cas de cession unique de plusieurs locaux d’un ensemble commercial, de cession unique de locaux commerciaux distincts ou de cession d’un local commercial au copropriétaire d’un ensemble commercial. ll n’est pas non plus applicable à la cession globale d’un immeuble comprenant des locaux commerciaux ou à la cession d’un local au conjoint du bailleur, ou à un ascendant ou un descendant du bailleur ou de son conjoint.

Dans cette affaire, le locataire, sollicitait l’annulation de la vente du bien immobilier passé par nos clients, en arguant du non-respect du droit de préemption dont il prétendait bénéficier.

Ainsi, comme le relève la Cour : « le problème juridique soumis à l’appréciation de juges est de savoir si le droit de préemption offert par Maître [G] à la Sarl O était applicable. »

Selon la cour, il résulte des compromis de vente en date du 18 octobre 2018 produits par Me [I] [L], notaire, qui a succédé à Maître [G], notaire , que la vente des lots composant l’immeuble devait s’effectuer au profit de la SCI J. par le biais de deux opérations de ventes distinctes mais indissociables, en procédant , d’une part, à la cession des lots n°1, 2, 3, 4, 5, 7 et 9 appartenant à la SCI I.et d’autre part, à la cession du lot n°6 appartenant à Monsieur P.

Chaque compromis prévoyait ainsi, à titre de condition suspensive ‘l’acquisition du ou des autres lots composant l’immeuble :

– dans la promesse de vente concernant Monsieur [P] «’Acquisition des lots n°1 à 5 et 7 à 9 inclus dépendant de l’immeuble .

La présente convention est soumise à la condition suspensive de la régularisation de la vente par la SCI I. au profit de l’acquéreur des lots n°1 à 5 et 7 à 9 inclus dépendant de l’immeuble, les deux ventes étant indissociables’»,

– dans la promesse de vente concernant la SCI : «Acquisition du lot n°6 dépendant de l’immeuble .

La présente convention est soumise à la condition suspensive de la régularisation de la vente par Monsieur et Madame [C]-[B] au profit de l’acquéreur du lot n°6 dépendant de l’immeuble, les deux ventes étant indissociables’».

La Cour en déduit, conformément à ce que nous avions conclu:

« Ainsi la rédaction de ces promesses de vente démontre, que contrairement à l’analyse qu’a fait de l’opération juridique le premier notaire, Maître [G], en vertu du dernier alinéa de l’article L.145-46-1 du code de commerce précité, le droit de préemption institué au profit du preneur d’un local commercial ne pouvait bénéficier à la SARL O dans la mesure où la cession globale de l’immeuble était projetée au profit de la SCI J. »

Dans ces conditions, la SARL O ne peut se prévaloir du non-respect de son droit de préemption par son bailleur et est déboutée de sa demande d’annulation de la vente et d’indemnisation du préjudice subséquent en lien avec la perte du bénéfice de la cession, à la grande satisfaction de nos clients.

Cour d’Appel de REIMS, 07 février 2023, n° 22/00128.

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