Permis tacite, demande de démolition: interprétation nécessaire du juge administratif

Le 8 Juin 2021

Par Patrick Gaulmin

M. E., propriétaire d’un domaine viticole, a déposé une demande de permis de construire en vue de l’édification d’une maison à usage d’habitation.

Par un arrêté du 30 mars 2012, le maire a refusé de délivrer le permis sollicité.

Par un jugement du 21 décembre 2012, le tribunal administratif a annulé cet arrêté.

Le 2 janvier 2013, M. E a confirmé sa demande de permis de construire sur le fondement de l’article L. 600-2 du code de l’urbanisme.

Par un arrêt du 19 décembre 2014, la cour administrative d’appel a, sur l’appel de la commune, annulé le jugement du 21 décembre 2012.

M. E. ayant construit sa maison dans le courant de l’année 2013, la commune l’a assigné en démolition sur le fondement de l’article L. 480-14 du code de l’urbanisme.

Or, M. E. soutenait qu’il bénéficiait d’un permis de construire tacite.

Dans cette hypothèse, le juge civil devait surseoir à statuer et poser une question préjudicielle au juge administratif, si du moins la difficulté en question est sérieuse.

C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans un arrêt récent (Cass. Civ. 27 mai 2021, n° 20-23.287).

«lorsque la solution d’un litige dépend d’une question soulevant une difficulté sérieuse et relevant de la compétence de la juridiction administrative, la juridiction judiciaire initialement saisie la transmet à la juridiction administrative compétente en application du titre Ier du livre III du code de justice administrative. »

« s’il n’appartient qu’à la juridiction judiciaire de statuer sur l’action d’une commune tendant, sur le fondement de l’article L. 480-14 du code de l’urbanisme, à la démolition d’une construction irrégulièrement édifiée sur une propriété privée, il appartient à la juridiction administrative de statuer sur l’existence d’un permis de construire tacite, conformément auquel la construction aurait été édifiée, né du silence gardé par l’administration à l’expiration du délai d’instruction de la confirmation de la demande de permis de construire formée par le pétitionnaire sur le fondement de l’article 600-2 du code de l’urbanisme, avant que le jugement d’annulation de la décision qui a refusé de délivrer le permis de construire ne soit définitif. »

« Pour accueillir la demande en démolition, l’arrêt retient qu’il se déduit de l’article L. 600-2 du code de l’urbanisme que la confirmation de la demande de permis de construire sur le fondement de ces dispositions doit intervenir dans les six mois suivant la notification de la décision qui confère un caractère définitif à l’annulation du refus de permis de construire, que M. E était irrecevable en sa demande présentée le 2 janvier 2013 puisque, à cette date, la décision du tribunal administratif n’était pas définitive et que, dès lors, il n’était pas titulaire d’un permis de construire tacite lorsqu’il a procédé aux travaux de construction de sa maison dans le courant de l’année 2013, sa demande irrecevable n’ayant pu faire courir le délai à l’issue duquel, en l’absence de refus de l’administration, le pétitionnaire est de plein droit titulaire d’un permis tacite.

En statuant ainsi, la cour d’appel, qui a excédé ses pouvoirs, a violé les textes susvisés ».

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