La régularisation des associations syndicales libres (ASL)

Le 19 Juin 2014

Par Patrick Gaulmin

Les ASL qui n’ont pas mis en conformité leurs statuts avec les dispositions de l’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 avant le 5 mai 2008 ont perdu la capacité juridique d’accomplir les actes listés à l’article 5 de l’ordonnance : agir en justice, acquérir, vendre, échanger, transiger, emprunter et hypothéquer.

Elles ont cependant la possibilité de recouvrer leurs droits en accomplissant, même après l’expiration du délai prévu par l’article 60, les mesures de publicité prévues par l’article 8 de ladite ordonnance.

Tel est le sens de la décision rendue récemment par la Cour de Cassation (Cass. 3e civ., 13 févr. 2014, n° 13-22.383).

L’ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 et son décret d’application n° 2006-504 du 3 mai 2006 ont mis fin au régime des associations syndicales de propriétaires résultant de la loi du 21 juin 1865 et le décret du 18 décembre 1927.

Ainsi les nouveaux statuts doivent être conformes aux dispositions des articles 7 et 8 de l’ordonnance et définir le nom, l’objet, le siège et les règles de fonctionnement de l’ASL, comporter la liste des immeubles compris dans son périmètre et préciser ses modalités de financement et le mode de recouvrement des cotisations.

Les ASL devaient également procéder aux mesures de publicité prévues à l’article 8 (déclaration en préfecture, publication au Journal officiel).

De nombreuses ASL ne l’ont pas fait.

Le délai prévu de deux ans à compter de la publication du décret du 3 mai 2006 ayant expiré le 5 mai 2008, la Cour de cassation a été amenée à tirer les conséquences de cette absence de respect de l’ordonnance.

Or, l’article 5 de l’ordonnance prévoit que « Les associations syndicales de propriétaires peuvent agir en justice, acquérir, vendre, échanger, transiger, emprunter et hypothéquer sous réserve de l’accomplissement des formalités de publicité prévues selon le cas aux articles 8, 15 ou 43 ».

Bien qu’aucune sanction expresse du défaut de mise en conformité n’ait été prévue par l’ordonnance, la Cour de cassation a ainsi considéré dans un arrêt du 5 juillet 2011 (Cass. 3e civ., 5 juill. 2011, n° 10-15.374), qu’en omettant de mettre ses statuts en conformité, une association foncière urbaine avait perdu son droit d’agir en justice.

Dans un arrêt de la troisième chambre civile du 11 septembre 2013 (Cass. 3e civ., 11 sept. 2013, n° 12-22.351), la Cour de cassation avait précisé que l’absence de mise en conformité des statuts de l’ASL ne remettait pas en cause l’existence légale de cette association, résultant du consentement unanime de ses membres constaté par écrit.

En conséquence, et conformément aux dispositions de l’article 8, dernier alinéa de l’ordonnance, l’omission des formalités ne pouvait être opposée aux tiers par les membres de l’association.

Les associations syndicales négligentes ne sont donc pas privées de personnalité morale.

Restait à savoir s’il était possible de régulariser la situation alors que le délai de deux ans était dépassé.

En refusant le renvoi de la question prioritaire de constitutionnalité (QPC) qui était soulevée, la Cour de cassation rejoint la position de l’Administration, et offre ainsi aux ASL négligentes, une chance de se rattraper.

La QPC posait la question de l’éventuelle contradiction de la perte du droit d’ester en justice avec le droit à un recours juridictionnel effectif découlant de l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, « en tant qu’il prévoit un délai de mise en conformité dont l’inobservation entraîne, selon une interprétation jurisprudentielle constante, la perte pure et simple du droit d’agir en justice de l’association syndicale libre constituée antérieurement à l’ordonnance du 1er juillet 2004 ».

La Cour de cassation estime alors que la question posée ne présente pas un caractère sérieux, « en ce que l’article 60 de l’ordonnance du 1er juillet 2004, en tant qu’il prévoit un délai de mise en conformité dont l’inobservation entraîne, selon une interprétation jurisprudentielle constante, la perte du droit d’agir en justice des associations syndicales libres constituées antérieurement à l’ordonnance du 1er juillet 2004, ne porte pas une atteinte substantielle au droit des associations syndicales libres à un recours juridictionnel effectif dès lors qu’elles ont la possibilité de recouvrer leur droit d’ester en justice en accomplissant, même après l’expiration du délai prévu par l’article 60, les mesures de publicité prévues par l’article 8 de ladite ordonnance ».

La perte du droit d’ester en justice n’est donc pas définitive, et il suffit aux ASL négligentes de se conformer à l’injonction de mettre en conformité leurs statuts et de procéder aux formalités de publicité requises.

Il faut rappeler que le droit d’ester en justice, d’autres actes sont interdits aux ASL négligentes, puisque c’est l’ensemble des actes mentionnés à l’article 5 de l’ordonnance qui sont concernés par la perte de capacité juridique : elles ne peuvent ainsi ni acquérir, ni vendre, ni échanger, ni transiger, ni emprunter, ni hypothéquer.

Les ASL ont donc intérêt à régulariser au plus tôt leurs statuts et à procéder aux formalités de publicité.

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