L’hyperplanification en matière d’urbanisme

Le 17 Fév 2012

Par Patrick Gaulmin

Un auteur vient de faire un recensement, non exhaustif des instruments de planification en matière d’urbanisme (S. PERIGNON, Revue Construction Urbanisme, 2012, n°2).

La liste est édifiante : charte intercommunale de développement et d’aménagement, charte de parc naturel national ou régional, directive territoriale d’aménagement, directive territoriale d’aménagement et de développement durables, directive de protection et de mise en valeur des paysages, document stratégique de façade maritime, périmètre de protection et de mise en valeur des espaces agricoles et périurbains, plan de déplacement urbain, plan local d’urbanisme (PLU), plan de prévention des risques miniers, naturels ou technologiques, plan de sauvegarde et de mise en valeur d’un secteur sauvegardé, programme local de l’habitat, schéma d’aménagement et de gestion des eaux, schéma d’aménagement régional, schéma régional de cohérence écologique, schéma de cohérence territorial (SCOT), schéma d’aménagement commercial, schéma de mise en valeur de la mer, schéma de services collectifs, schéma régional d’aménagement et de développement du territoire, zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP), à laquelle se substituera bientôt l’aire de mise en valeur de l’architecture et du patrimoine…

Outre ces « outils », il faut aussi ajouter les servitudes, inventaires, réseaux, trames, zonages et schémas sectoriels « qui aboutissent à une sédimentation baroque de normes directes ou indirectes qui encadrent toute évolution des territoires.

Le législateur a entendu qu’aucune parcelle du territoire n’échappe à terme à cette hyperplanification, la nouvelle rédaction de l’article L. 122-2 du Code de l’urbanisme soumettant l’ensemble des communes à la règle de l’extension limitée en l’absence de SCOT à compter du 1er janvier 2017.

Cette volonté de contrôle total de la projection spatiale de notre société s’est également accompagnée d’un renforcement continu du caractère prescriptif des documents de planification et d’une généralisation de l’évaluation environnementale des plans et programmes. De la consommation d’espace à la mixité sociale, du commerce de détail à la biodiversité, toutes les problématiques économiques, sociales et environnementales doivent rentrer dans le champ de cette hyperplanification.

Ces ambitions démesurées participent de l’illusion technicienne et reposent sur un postulat épistémologique : la capacité par les responsables d’une maîtrise rationnelle de l’ensemble des données qui conditionnent l’organisation de l’espace.

Elles se heurteront toujours à la complexité des interactions entre les choix individuels et les choix du législateur.

Cette extension du domaine de la planification induit par ailleurs des coûts croissants d’études et d’expertises que les collectivités territoriales devront supporter si elles le peuvent.

Dans un contexte où l’argent public ne pourra plus être considéré comme extensible à l’infini, il serait peut être pertinent d’évaluer sereinement les coûts et bénéfices de cet empilement législatif, et pour le moins de stopper une dérive où le moindre espace de liberté est désormais considéré comme un vide juridique ».

Cette hyperplanification en matière d’urabnisme est une traduction de l’inflation normative continue que nous dénonçons régulièrement (voir notre article : Corruptissima republica plurimae leges du 29 mars 2010).

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