La durée totale des procédures depuis la saisine du magistrat chargé de suivre la mise en œuvre et la mise à jour des traitements automatisés de données à caractère personnel, le 24 juin 2015, jusqu’à la décision du 31 mars 2021, qui est de plus de cinq ans, doit être regardée comme excessive, eu égard aux spécificités de la procédure devant des autorités judiciaires. Par suite, la responsabilité de l’État est engagée. (T. confl., 8 nov. 2021, n° C4227 , M. P. / Garde des Sceaux).

Dans cette affaire, M. A… a demandé, par requête du 24 juin 2015, au magistrat, désigné par le ministre de la justice, chargé de suivre la mise en œuvre et la mise à jour des traitements automatisés de données à caractère personnel mentionnés à l’article 230-6 du code de procédure pénale, de procéder à l’effacement de la mention de sa mise en cause pour des faits survenus en 1994 dans le fichier de traitement des antécédents judiciaires. Le silence gardé sur cette demande a fait naître une décision implicite de refus, dont M. A… a demandé, par requête enregistrée le 11 mai 2016, l’annulation au tribunal administratif de Versailles. Par une ordonnance du 3 octobre 2016, devenue définitive par l’effet de l’ordonnance du 25 février 2018 du président de la 1ère chambre de la cour administrative d’appel de Versailles, le premier conseiller faisant fonction de président de la 1ère chambre du tribunal administratif de Versailles a rejeté le recours de M. A… comme porté devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître.

 Par requête réceptionnée le 11 octobre 2016, M. A… a saisi le président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris, lequel, par ordonnance du 23 octobre 2019, s’est déclaré incompétent pour statuer sur sa demande. Sur requête de M. A…, enregistrée le 30 décembre 2019, tendant à ce que le Tribunal des conflits, en application de l’article 37 du décret du 27 février 2015, détermine l’ordre de juridiction compétent pour statuer sur sa demande, la juridiction judiciaire a été désignée par décision du 8 juin 2020. Saisi par requête déposée au greffe le 22 juin 2020, le président de la chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris a fait droit à la demande d’effacement par ordonnance du 31 mars 2021.

 Par requête du 27 juillet 2020, M. A… a demandé au ministre de la justice le versement d’une indemnité de 10 000 euros en réparation des préjudices qu’il estime avoir subis en raison des délais, qu’il qualifie de déraisonnables, de l’instruction de sa demande d’effacement. En l’absence de réponse dans un délai de deux mois, il a saisi, le 24 juin 2021, le Tribunal à cette fin.

Le caractère excessif du délai de jugement d’une affaire doit s’apprécier en tenant compte des spécificités de chaque affaire et en prenant en compte sa complexité, les conditions de déroulement des procédures et le comportement des parties tout au long de celles-ci, ainsi que l’intérêt qu’il peut y avoir, pour l’une ou l’autre partie au litige, à ce que celui-ci soit tranché rapidement.

En l’espèce, le Tribunal des Conflits estime que la durée totale des procédures depuis la saisine du magistrat chargé de suivre la mise en œuvre et la mise à jour des traitements automatisés de données à caractère personnel, le 24 juin 2015, jusqu’à la décision du 31 mars 2021, qui est de plus de cinq ans, doit être regardée comme excessive, eu égard aux spécificités de la procédure devant des autorités judiciaires. Par suite, la responsabilité de l’État est engagée.

Cette durée excessive a occasionné pour M. A… un préjudice moral lié à une situation prolongée d’incertitude. Dans les circonstances de l’espèce, il en sera fait une juste appréciation en condamnant l’État à lui verser une indemnité de 2 000 euros au titre de ce préjudice.