Nouveau recul du droit au recours devant le juge administratif

Le 2 Nov 2020

Par Patrick Gaulmin

Une décision non réglementaire est susceptible de se trouver dans le champ de la jurisprudence Czabaj (CE, ass., 13 juill. 2016, n° 387763) qui instaure la notion de délai raisonnable de recours ne pouvant excéder un an.

C’est le cas des décisions, ni individuelles, ni réglementaires, dont la notification à certains destinataires est néanmoins requise pour déclencher le délai de recours (CE, 25 sept. 2020, n° 430945, SCI La Chaumière).

Le délai raisonnable d’un an est alors opposable à ces destinataires qui ont reçu notification de la décision, mais sans mention des voies et délais de recours, ou qui en ont eu tout simplement connaissance.

Le litige portait ici sur un arrêté préfectoral prononçant le transfert d’office dans le domaine public communal, sans indemnité, de voies privées ouvertes à la circulation publique, appartenant aux requérants.

Bien que le texte régissant cette procédure (C. urb., art. L. 318-3) ne le prévoie pas, une notification de la décision aux propriétaires concernés est indispensable pour déclencher le recours, estime le juge de cassation, même si l’arrêté a été publié ou affiché. Réservée aux décisions à caractère individuel, la jurisprudence Czabaj est ainsi étendue à des actes qui ne le sont pas mais qui, sans être réglementaires, doivent être notifiés.

Le principe de sécurité juridique (qui concernait à l’origine les décisions expresses individuelles, jurisprudence CZABAJ) est depuis retenu pour des décisions implicites, le délai courant alors soit de la date à laquelle l’intéressé a été clairement informé des conditions de naissance d’une telle décision, soit de la date de l’événement marquant la connaissance de la décision (CE, 18 mars 2019, n° 417270 ).

De même les décisions à objet purement pécuniaire relèvent également du principe du délai raisonnable (CE, 9 mars 2018, n° 405355, Cté de communes du pays roussillonnais), à la différence des recours mettant en jeu la responsabilité d’une personne publique, pour lesquels les règles de prescription prennent exclusivement en compte la recherche de stabilité des situations consolidées par l’effet du temps (CE, 17 juin 2019, n° 413097, Centre hospitalier de Vichy).

Le Conseil d’Etat réserve toutefois le cas (soumis à l’appréciation souveraine des juges du fond) de circonstances particulières susceptibles de justifier que le délai d’un an soit prorogé.

C’est ainsi que, dans la présente affaire, le juge de cassation constate que le juge d’appel a souverainement estimé que l’atteinte portée par l’arrêté au droit de propriété ne constituait pas un motif pertinent de prorogation du délai raisonnable (!).

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