Constructibilité dans les parties urbanisées de la commune

Le 14 Juin 2019

Par Patrick Gaulmin

Dans le cadre de la dérogation au principe de constructibilité limitée, peuvent être autorisés des projets qui, eu égard à leur implantation par rapport aux constructions existantes et à leur ampleur limitée en proportion de ces constructions, peuvent être regardés comme ne procédant qu’à l’extension de ces constructions, sans qu’aucune condition tenant au caractère mesuré de l’extension ne s’applique.

Ainsi statue le Conseil d’Etat dans un arrêt rendu le 29 mai 2019 (CE 1° et 4° ch.-r., 29 mai 2019, n° 419921).

Aux termes de l’article L. 111-1-2 du code de l’urbanisme alors en vigueur, désormais repris aux articles L. 111-3 et L. 111-4 du même code :

 » I.- En l’absence de plan local d’urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d’urbanisme en tenant lieu, seuls sont autorisés, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : / 1° L’adaptation, le changement de destination, la réfection, l’extension des constructions existantes ou la construction de bâtiments nouveaux à usage d’habitation à l’intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole, dans le respect des traditions architecturales locales ; (…) « .

Ces dispositions interdisent en principe, en l’absence de plan local d’urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers ou de tout document d’urbanisme en tenant lieu, les constructions implantées  » en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune « , c’est-à-dire des parties du territoire communal qui comportent déjà un nombre et une densité significatifs de constructions. Il s’ensuit que les constructions ne peuvent être autorisées en dehors de ces parties, sauf dans le cas où elles relèvent des exceptions expressément et limitativement prévues par l’article L. 111-1-2.

A cet égard, le 1° du I de l’article L. 111-1-2 prévoit deux exceptions que sont, d’une part, l’adaptation, le changement de destination, la réfection et l’extension des constructions existantes et, d’autre part, depuis la modification apportée par la loi du 25 mars 2009 de mobilisation pour le logement et la lutte contre l’exclusion, la construction de bâtiments nouveaux à usage d’habitation à l’intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole et dans le respect des traditions architecturales locales.

Au titre de la première de ces deux exceptions, peuvent être autorisés des projets qui, eu égard à leur implantation par rapport aux constructions existantes et à leur ampleur limitée en proportion de ces constructions, peuvent être regardés comme ne procédant qu’à l’extension de ces constructions. Aucune disposition n’impose toutefois qu’une extension satisfaisant à ces critères doive en outre, pour pouvoir être autorisée au titre du 1° du I de l’article L. 111-1-2, présenter un caractère  » mesuré « . Il résulte, enfin, de cet article, éclairé par les travaux parlementaires ayant conduit à l’adoption de la loi du 25 mars 2009, que la condition tendant au respect des traditions architecturales locales, résultant de cette loi, ne s’applique pas à l’extension des constructions existantes, mais seulement à la construction de bâtiments nouveaux.

Au titre de la seconde exception, peut être autorisée la construction de bâtiments nouveaux à usage d’habitation, à la double condition qu’ils soient implantés à l’intérieur d’un périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole et qu’ils respectent les traditions architecturales locales. Le bénéfice de cette exception n’est pas réservé aux cas dans lesquels le périmètre constitué par les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole est clos, mais peut aussi valoir pour les cas où les bâtiments nouveaux sont implantés dans un espace entouré de bâtiments agricoles suffisamment rapprochés pour pouvoir être regardés comme délimitant, même sans clôture ou fermeture, un périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole.

En l’espèce, pour confirmer l’annulation pour excès de pouvoir de l’arrêté par lequel le préfet de l’Orne avait refusé de délivrer un permis de construire à M. D…et MmeC…, la cour administrative d’appel de Nantes a, d’une part, jugé que le préfet, en imposant que l’extension d’une construction existante, pour pouvoir être autorisée sur le fondement des dispositions précitées du 1° du I de l’article L. 111-1-2 du code de l’urbanisme, devait présenter un caractère mesuré, avait opposé une condition non prévue par la loi. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la cour, en statuant ainsi, n’a pas commis d’erreur de droit.

La cour administrative d’appel a, d’autre part, jugé que le projet de construction, s’il devait être regardé comme une construction nouvelle, était situé à l’intérieur du périmètre regroupant les bâtiments d’une ancienne exploitation agricole. En statuant ainsi, alors même que l’espace délimité par les constructions agricoles rapprochées qu’elle a prises en compte n’était pas clos, la cour s’est livrée, sans erreur de droit et en motivant suffisamment son arrêt sur ce point, à une appréciation souveraine des faits de l’espèce qui est exempte de dénaturation. La cour s’étant bornée à relever que le projet se situait au sein d’un tel périmètre pour juger que le préfet n’aurait pu légalement le refuser au motif qu’il constituerait une construction nouvelle et non une extension d’une construction existante, le ministre ne peut utilement soutenir qu’elle aurait commis une erreur de droit en ne recherchant pas si le projet satisfaisait, en outre, à l’ensemble des conditions auxquelles sont subordonnées les constructions de bâtiments nouveaux à usage d’habitation sur le fondement de l’article L. 111-1-2 du code de l’urbanisme.

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