Marché public: recours en annulation et en indemnisation

Le 31 Jan 2017

Par Patrick Gaulmin

Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l’excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d’un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles.

Toutefois, si le représentant de l’Etat et les membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale concerné, peuvent invoquer tout moyen à l’appui du recours ainsi défini, les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l’intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d’une gravité telle que le juge devrait les relever d’office.

Le tiers agissant en qualité de concurrent évincé de la conclusion d’un contrat administratif ne peut ainsi, à l’appui d’un recours contestant la validité de ce contrat, utilement invoquer, outre les vices d’ordre public, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction.

Par ailleurs, aux termes du III de l’article 53 du code des marchés publics : « Les offres inappropriées, irrégulières et inacceptables sont éliminées (…)

Dans cette affaire, une société qui n’avait pas été retenue pour le marché présentait une demande tendant à l’annulation du marché d’une part et à son indemnisation d’autre part.

Le Tribunal administratif de Nice a rejeté sa requête pour les motifs suivants (jugement du 30 janvier 2017, n° 150626)

1. S’agissant de la demande d’annulation, ainsi que le soutenait la commune, notre cliente, l’offre de la société requérante ne proposait pas une option que le règlement de la consultation imposait aux candidats de proposer et de chiffrer.

Par suite, pour le Tribunal , l’offre présentée par la requérante était irrégulière et cette irrégularité n’est pas le résultat du manquement qu’elle dénonce

Il suit de là que le manquement aux règles de passation du contrat invoqué par la société requérante n’est pas en rapport direct avec son éviction.

Dès lors, la requérante ne peut utilement se prévaloir de ce que l’offre de la société attributaire aurait été irrégulière et ses conclusions à fin d’annulation du marché doivent être rejetées.

2. S’agissant de la demande d’indemnisation de la requérante, le Tribunal rappelle que lorsqu’un opérateur économique candidat à l’attribution d’un contrat public demande la réparation du préjudice né de son éviction irrégulière de ce contrat, il appartient au juge de vérifier d’abord si cet opérateur était dépourvu de toute chance de remporter le contrat.

 Dans l’affirmative, celui-ci n’a droit à aucune indemnité. Dans la négative, il a droit en principe au remboursement des frais qu’il a engagés pour présenter son offre. Dans le cas où l’opérateur économique avait des chances sérieuses d’emporter le contrat, il a droit à l’indemnisation de l’intégralité du manque à gagner qu’il a subi.

Dès lors que l’offre d’un candidat irrégulièrement évincé d’une procédure de passation d’un marché par concours était irrégulière, ce candidat, de ce seul fait, ne peut être regardé comme ayant été privé d’une chance sérieuse d’obtenir le marché, y compris lorsque l’offre retenue était tout aussi irrégulière, et n’est pas fondé, par suite, à demander réparation d’un tel préjudice.

Par suite, le Tribunal considère en l’espèce que la société requérante n’est pas fondée à soutenir qu’elle a été privée d’une chance sérieuse d’obtenir le marché, son offre étant irrégulière.

En conséquence, « eu égard à l’irrégularité de son offre, elle doit être regardée comme ayant été dépourvue de toute chance de remporter le contrat » et ses les conclusions à fin d’indemnisation ne peuvent qu’être rejetées.

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