Constitutionnalité des contraventions de grande voirie sur le domaine public

Le 11 Juin 2012

Par Patrick Gaulmin

En vertu de l’article L. 2132-3 du Code général de la propriété des personnes publiques : « Nul ne peut bâtir sur le domaine public maritime ou y réaliser quelque aménagement ou quelque ouvrage que ce soit sous peine de leur démolition, de confiscation des matériaux et d’amende. Nul ne peut, en outre, sur ce domaine, procéder à des dépôts ou à des extractions, ni se livrer à des dégradations

Depuis plusieurs années, notre cabinet assiste un client faisant l’objet de contraventions, dites contraventions de grande voirie, pour une prétendue atteinte au domaine public maritime.

Suite à un jugement du Tribunal administratif de TOULON, nous avions, dans le cadre de l’appel, déposé une question prioritaire de constitutionnalité sur la constitutionnalité de cet article L. 2132-3 du CGPPP.

La Cour administrative d’appel de MARSEILLE a transmis notre QPC au Conseil d’Etat.

Le Conseil d’Etat vient de se prononcer, en considérant qu’il n’y avait pas lieu de transmettre ladite question au Conseil constitutionnel (30 mai 2012, n° 357694, B., JurisData n° 2012-011608).

Le Juge estime que les éléments constitutifs de l’infraction et les personnes susceptibles d’en être poursuivis étant « définis avec suffisamment de précision et de clarté » notamment quant au fait que l’amende peut concerner tout propriétaire qu’il ait ou non construit lui-même sur le domaine litigieux, l’inconstitutionnalité n’est pas invocable.

De même, ne sont pas mobilisables les principes d’égalité (selon que le propriétaire ait ou non construit le bien personnellement) et l’atteinte hypothétiquement excessive au droit de propriété.

Nous désapprouvons totalement cette décision car, contrairement à ce qu’affirme le Conseil d’Etat, les éléments constitutifs de l’infraction et les personnes susceptibles d’en être poursuivis ne sont absolument pas « définis avec suffisamment de précision et de clarté » par les textes.

En effet, c’est le Conseil d’Etat, lui-même, qui a entendu inclure, au fil de ses décisions, dans la catégorie des contrevenants les personnes qui n’ont pas construit l’ouvrage, en interprétant largement l’article L.2132-3 du CGPPP.

Toute personne propriétaire d’un bien dont une partie aurait été construite sur le domaine public est donc susceptible de se voir verbaliser, quand bien même elle n’a ni construit ni entretenu ledit ouvrage, quelque soit la taille de l’ouvrage (en l’espèce 2 m² environ !) et quand bien même celui-ci serait édifié depuis des dizaines d’années.

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